Activité clinique :
 
 
traitement de l'adénome de la prostate

Trois notions vont guider les indications opératoires :

a) L'importance de la gêne fonctionnelle

b) Le degré de retentissement de l'adénome sur l'appareil urinaire

c) L'état général du malade

Le diagnostic clinique d'hypertrophie bénigne de la prostate ne nécessite pas le plus souvent d'intervention immédiate et une simple surveillance est l'alternative de choix si les symptômes sont minimes et si la qualité de vie du patient n'est pas compromise.

Souvent le patient est gêné par des troubles mictionnels, surtout irritatifs (pollakiurie, impériosités mictionnelles), mais il n’existe pas de syndrome obstructif retentissant sur le fonctionnement vésical : dans ces cas un traitement médical peut être décidé qui sera modifié selon le résultat fonctionnel obtenu, et une surveillance toujours continuée.

Le traitement chirurgical est indiscutablement indiqué en cas de rétention urinaire aiguë non médicamenteuse, en cas d'insuffisance rénale obstructive, d'infection urinaire à répétition, de calcul vésical et d'hématurie récidivante, si l'état du patient le permet. Dans ces cas, les résultats des traitements chirurgicaux actuels (adénomectomie prostatique par voie haute, résection endoscopique de prostate selon les cas) sont excellents. Le volume de la prostate en soi n’est pas une indication opératoire.

1) LES TRAITEMENTS NON CHIRURGICAUX
a) La phytothérapie (traitement à base d’extraits de plante)

Utilisés depuis très longtemps, ces médicaments améliorent indéniablement les symptômes chez certains patients mais leur efficacité n'a pas été prouvée par des études scientifiques.

b) Les alphabloquants

La base physiologique de l'utilisation des alphabloquants (antagonistes des récepteurs a-1 adrénergiques) est la présence de cellules musculaires lisses dans la capsule prostatique et le col cervical, qui contribue à augmenter la résistance à la vidange vésicale, sous l'action des récepteurs a-1 adrénergiques. Les alphabloquants induisent in vitro une relaxation du muscle lisse et pourraient donc entraîner une diminution de la "tension" prostatique. Ils n'ont pas d'action sur le volume de la glande qui n'est pas modifié.

La plupart des études cliniques ont montré que cette classe de médicaments permet d'obtenir une amélioration significative des symptômes, mais l'amélioration des données objectives, jugée sur la débitmétrie, a été inconstante. Il n'y a pas d'étude montrant que l'efficacité des alphabloquants se maintient à long terme, ou qu'un des alphabloquants à visée urinaire est supérieur à un autre.

Les inconvénients sont dus au risque d'hypotension orthostatique, obligeant à des précautions en début de traitement, et on évite leur emploi chez les patients prenant certains médicaments antihypertenseurs.

c) L'inhibition de la 5 a-réductase

La 5 a-réductase est une enzyme qui permet la transformation intraprostatique de la testostérone en dihydrotestostérone (DHT), androgène plus puissant, médiateur de l'action de la testostérone, qui paraît être un facteur important de la croissance prostatique. L'idée d'utiliser un inhibiteur de la 5 a-réductase pour traiter l'hypertrophie bénigne de la prostate dérive de l'observation de patients ayant un déficit congénital de cette enzyme, et qui présentent pour seule anomalie une absence de développement de la glande prostatique. La découverte de cette mutation exceptionnelle a permis de montrer que l'on pouvait espérer par inhibition spécifique de la 5 a-réductase, altérer la croissance prostatique sans affecter les fonctions sexuelles. L'enzyme n'a aucune autre fonction dans l'organisme que sa fonction intraprostatique, et son inhibition ne donne donc aucun effet secondaire.

Un inhibiteur enzymatique spécifique diminue la DHT intratesticulaire de 90 %, sans modifier la testostéronémie.

2) LES TRAITEMENTS CHIRURGICAUX "CLASSIQUES"
a) Résection endoscopique de prostate

C'est actuellement la technique chirurgicale la plus utilisée pour le traitement de l'hypertrophie bénigne de la prostate. Il s'agit d'une intervention qui "rabote" l'adénome en laissant la capsule prostatique constituée par la glande normale refoulée en périphérie. La résection est une technique difficile qui ne peut être faite que par un chirurgien-urologue. L'intervention dure habituellement moins d'une heure, et permet de traiter les prostates jusqu'à 60 ou 70 grammes. L'intervention est faite sous rachi-anesthésie ou anesthésie générale. Un cathéter urétral est laissé en place pendant deux à trois jours et la durée d'hospitalisation est de cinq à six jours. Les patients ont habituellement une éjaculation rétrograde après l'intervention.

b) Adénomectomie prostatique par voie haute

En cas de gros adénome (supérieur à 70 g), l'intervention par voie endoscopique cède le pas à une adénomectomie par voie haute menée par une courte incision sus-pubienne. Les effets secondaires et les risques de cette intervention sont les mêmes que ceux de la résection endoscopique. Le cathéter urétral est laissé environ six jours et l'hospitalisation dure sept à huit jours. L'intervention par voie haute a prouvé son efficacité, car elle permet d'enlever des adénomes de fort volume avec un taux de réintervention plus bas qu'en cas d'intervention endoscopique.

c) Incision cervico-prostatique

Il s'agit de l'incision transurétrale du col vésical et de la prostate, menée en général de l'orifice urétéral jusqu'au veru montanum. Cette incision peut être médiane ou latérale, uni- ou bilatérale.

Cette intervention est simple, rapide, et permet le plus souvent de conserver une éjaculation normale. Elle ne peut s'appliquer qu'aux glandes de petit volume, n'ayant pas de lobe médian proéminent. Elle nécessitera une réintervention quelques années plus tard et est surtout réservée aux patients jeunes désireux de conserver une éjaculation : il faut cependant savoir que celle-ci peut devenir rétrograde même après cette intervention.

Les suites opératoires de ces 3 interventions "classiques" sont pratiquement identiques.

La mortalité postopératoire est très faible, de l'ordre de 1 %. L'hémorragie retardée, qui survient dans les 10 à 20 jours qui suivent l'intervention est en règle générale due à une chute d'escarre au niveau d'une hémostase de la loge prostatique. Elle est souvent peu importante et se tarit seule. Quelquefois, elle est plus grave et nécessite la mise en place d'une sonde vésicale qui permet d'extirper les caillots de la vessie et autorise à nouveau la libre circulation des urines.

La rétention et la dysurie postopératoires sont souvent dues à un simple oedème postopératoire favorisé par une infection urinaire. Elles céderont plus ou moins rapidement à un traitement désinfectant et anti-inflammatoire. La dysurie tardive peut être due à la constitution d'un diaphragme cervical c'est-à-dire à la construction d'un véritable "mur scléreux". L'urétrocystographie ascendante et mictionnelle en fera le diagnostic. Il sera traité par section endoscopique (urétrotomie endoscopique). On peut également voir survenir une sténose de l'urètre bulbo-membraneux, parfois de l'urètre antérieur, ou une sténose méatique ou rétroméatique.

Chez un patient opéré de la prostate qui voit réapparaître une dysurie, il faut toujours penser à la possibilité de la survenue d'un cancer sur la coque prostatique laissée en place après l'adénomectomie. Enfin, il peut exister de véritables récidives adénomateuses. Elles sont tardives, ne se produisant qu'entre 7 et 15 ans après l'adénomectomie. Cette récidive vraie est à distinguer des "pseudo-récidives" qui surviennent lorsqu'un lobe a été "oublié" ou reséqué incomplètement.

Des troubles de la continence sont fréquents dans les jours, voire les semaines qui suivent une intervention sur la prostate. On ne pourra parler véritablement d'incontinence qu'après plusieurs mois. Cette incontinence est rare (moins de 1 %). En fait, toutes ces complications sont bénignes ou rares et elles ne doivent pas faire oublier que, de nos jours, le traitement chirurgical de l'adénome de la prostate est simple (5 à 10 jours d'hospitalisation selon la technique) et que ses résultats sont excellents.

3) LES ALTERNATIVES INVASIVES
a) Les prothèses endo-urétrales

Il s'agit de segments de tube, plastiques ou métalliques, placés au niveau de l'urètre prostatique, maintenus en place par la pression de la glande, et qui maintiennent perméable la lumière urétrale. Ces prothèses sont utilisées en cas de contre-indication chirurgicale absolue, en cas de doute diagnostique chez des patients présentant des troubles mictionnels complexes où intervient une composante neurologique. Dans ce dernier cas, la mise en place provisoire d'une telle prothèse permet de faire la part des troubles d'origine obstructive. Les complications, fréquentes, sont liées à la migration, à l'infection et aux calcifications qui surviennent inévitablement.

b) L'hyperthermie et la thermothérapie

Ces deux méthodes consistent à élever la température du tissu prostatique, et elles diffèrent par la température atteinte. De nombreux modèles de machines existent, utilisant soit une approche endorectale, soit une approche endo-urétrale. L'élément actif est en général un système à micro-ondes.
L'hyperthermie, correspond à une température intraprostatique comprise entre 42°C et 45°C. Les résultats publiés ont souvent été non reproductibles, laissant encore un doute sur l'efficacité de la méthode. Il n'y a ni modifications histologiques de la prostate, ni diminution de son volume, et le mécanisme d'action de ce type de traitement est inconnu. Il semble que ce type de traitement soit surtout, en fait, une alternative au traitement médical symptomatique pour des patients très sélectionnés.
La thermothérapie peut créer une nécrose tissulaire définitive en chauffant le tissu prostatique à plus de 50°C. Cette nécrose est théoriquement remplacée par du tissu conjonctif qui se rétracte secondairement, aboutissant à une diminution du volume prostatique. Une amélioration subjective des symptômes a été obtenue dans 2/3 des cas et une amélioration objective dans 1/3 des cas. Les résultats sont cependant inférieurs à ceux de la résection transurétrale de prostate, et on observe une rétention urinaire dans 4 à 40 % des cas.

c) La résection par laser échoguidé

Elle représente un nouveau concept de traitement. L'appareil associe une fibre transmettant un rayonnement laser Nd:YAG et un échographe endo-urétral qui permet de visualiser les limites de la prostate et de guider le rayonnement laser, en suivant les effets de celui-ci sur le tissu prostatique. Le traitement induit une nécrose de coagulation du tissu prostatique, qui s'élimine secondairement. L'intervention n'entraîne aucun saignement et la sortie du patient est possible dès le lendemain. Les symptômes obstructifs sont améliorés après quelques semaines, une fois l'élimination tissulaire et la cicatrisation réalisées. Peu d’équipes utilisent cette méthode.